Page 55 - Une Famille Volante
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Accidents dramatiques




        Le dimanche 17 février 1935, quatre jours après le retour de leur croisière familiale au Sahara,
        Marcel Germain se rend à Maison-Blanche pour un second vol d’essai sur l’avion de sport Cau-
        dron-Renault Rafale F-ANAQ.

        Vers 16 heures, après un vol de démonstration de quinze minutes, le Rafale passe à 50 mètres
        au-dessus des hangars de l’aéroport, puis entame une remontée en chandelle. C’est alors que
        le moteur a des ratés à une altitude de 150 mètres et émet des bouffées de fumée noire. L’avion
        perd de sa puissance : Problème de carburation dû à un excès d’alimentation en essence et à un
        manque d’entrée d’air, conclura le rapport d’accident du Bureau Véritas.

        L’avion se met à flotter, balançant à gauche puis à droite, perdant rapidement de la hauteur dans
        ce décrochage et le Rafale vient s’écraser au sol, dans un champ de vignes.
        Au point d’impact on relèvera un sillon d’une trentaine de mètres, l’avion pulvérisé et le corps
        du pilote 100 mètres plus loin, au milieu des débris. Marcel a été tué sur le coup.

        La foule accourt vers le nuage de terre. L’ambulance et les secours de l’aviation militaire arrivent.
        Après avoir touché le sol, l’appareil a rebondi, glissé, roulé, capoté. Les docteurs Pouget et Morand
        ne peuvent que constater le décès. Jean-Baptiste Germain présent sur les lieux, témoin de l’acci-
        dent, se précipite vers son malheureux frère. Meurtri, il a la lourde charge d’informer la famille.

        L’ambulance de l’Aviation récupère le corps pour le transporter au domicile du défunt. Quatre
        jours auparavant, cette famille était heureuse, les trois frères Jacques, Marcel et Jean, ainsi que
        leur cousin Henry, accompagnés de leurs épouses, revenaient d’un voyage au Niger.
        La consternation est grande dans le monde de l’aviation nord-africaine, tous les journaux d’Alger
        diffusent la nouvelle à la une de leur édition du 18 février.

        Les obsèques ont lieu le lendemain à l’église Sainte Marie de Mustapha-Supérieur. L’absoute
        est donnée par Mgr Leynaud, archevêque d’Alger. Une foule de plus de 3 000 personnes suit le
        cortège funèbre jusqu’au cimetière de Saint-Eugène où des discours sont prononcés notamment
        par M. Billion du Plan président de l’Aéro-club d’Algérie, M. Pourcher directeur de la Navigation
        Aérienne et M. Tesquet maire de Mouzaïaville.

        Au-delà des officiels, on remarque la présence des gérants et du personnel des domaines Germain.
        Après les dernières prières prononcées sur la tombe de Marcel Germain, quatre appareils pilotés
        par MM. Ferraris de l’Aéro-club d’Algérie, Cazeaux et Duterriez moniteurs-pilotes, Billier et
        Tracol de l’Automobile-club d’Alger, tournoient dans le ciel en hommage suprême des aviateurs
        à leur infortuné camarade.

        « Celui qui se perd dans sa passion a moins perdu que celui qui a perdu sa passion ».

        Saint Augustin - Les Confessions
        Le 19 mars suivant, Marcel Germain sera cité à l’Ordre de la Nation par le Gouvernement de la
        République française.
        Sa veuve Mathilde Taty connaîtra un autre drame en 1952 : leur fils aîné Louis se tuera en voiture
        au même endroit que son père Marcel, son corps également retrouvé dans un champ de vignes.

        En hommage, le 22 mai 1949 l’Aéro-club d’Algérie baptisera Marcel Germain son Norécrin
        F-BEMR. Le 21 octobre 1956, lorsque cet avion sera remplacé après 2 000 heures de vol, il sera
        exposé pendant un mois à la Grande Poste d’Alger.



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